Des Soudanais·es en grève de la faim contre l’emprisonnement massif des exilé·es en Grèce

17/12/2025 - par Equipe - Politique

Depuis les camps de réfugié·es en Grèce, des exilé·es soudanais·es ont entamé mercredi dernier une grève de la faim pour dénoncer la criminalisation grandissante des personnes en quête d’un refuge, détenues illégalement par les autorités grecques financées par l’Union Européenne. Voici leur communiqué traduit en français.

Banderole affichée hier à Athène en soutien aux jeunes prévenus. Source : De.Criminalize

Depuis plusieurs mois, les Soudanais·es en quête de refuge arrivent nombreux·ses sur les côtes grecques et particulièrement en Crète. La Grèce a décidé de fermer ses portes aux exilé·es en suspendant pendant plusieurs mois toute possibilité de demander l'asile en Crète. Elle a, de plus, mené une politique d'incarcération massive des réfugié·es en les accusant faussement "d'aide à l'entrée irrégulière", comme nous l'avons expliqué dans un article en septembre dernier. Cette criminalisation insensée des exilé·es soudanais·es a suscité des mobilisations de soutien de nombreux·ses activistes grec·ques et européen·nes, dont le collectif De.Criminalize, ainsi que des mobilisations initiées par des collectifs de Soudanais·ses en Grèce comme le collectif Mataris.

Mercredi dernier, Sudfa, des soudanais·es résidant dans les camps de réfugié·es ont entamé une grève de la faim pour visibiliser et dénoncer cette politique de criminalisation inhumaine et injuste. A Sudfa, nous traduisons ici leur communiqué et apportons notre soutien à cette lutte, en solidarité avec tou·te·s les exilé·e·s criminalisé·es et détenu·es à cause des politiques migratoires européennes inhumaines et racistes.

"Nous, un groupe de réfugié·es soudanais·es dans les camps en Grèce, déclarons officiellement :

Le cœur lourd face à l’injustice, mais avec une détermination inébranlable, nous entamons une grève de la faim et de la circulation à durée indéterminée les 16 et 17 décembre 2025, pour protester contre une politique systématique qui, au lieu de nous considérer comme des personnes en quête de protection, nous traite comme des criminel·les derrière les barreaux.

Nous faisons la grève de la faim pour les raisons suivantes :

  • Pour manifester notre solidarité avec plus de 300 réfugié·es soudanais·es détenu·es dans des prisons grecques, uniquement pour avoir franchi des frontières en fuyant la guerre et les persécutions.

  • Pour exprimer notre rejet d’un procès collectif injuste visant 22 réfugié·es soudanais·es, dont des mineur·es, devant le tribunal de Chania en Crète, le 17 décembre.

  • Pour briser le mur du silence entourant les violations flagrantes par la Grèce du droit international qu’elle s’est engagée à respecter.

La Grèce viole l’article 31 de la Convention de Genève de 1951 relative au statut des réfugié·es, qu’elle a ratifiée en 1960, qui stipule :

  • Que les réfugié·es qui entrent dans le pays de manière dite « illégale » ne doivent pas être criminalisé·es lorsqu’ils ou elles arrivent directement d’un territoire où leur vie ou leur liberté sont menacées.

  • Qu’ils ou elles ne doivent pas être détenu·es pour cette entrée « illégale », dans la mesure où ils ou elles se présentent sans délai aux autorités.

  • Que toutes les personnes doivent bénéficier d’un délai raisonnable pour déposer une demande de protection.

Le fait que le gouvernement grec nous place en détention et nous poursuive en justice pour la seule raison d’avoir cherché un refuge sûr, constitue une trahison de cet engagement international et de notre humanité commune.

Nos revendications sont :

  • La libération immédiate et inconditionnelle de tou·tes les réfugié·es soudanais·es détenu·es pour des infractions liées au franchissement des frontières.

  • L’arrêt immédiat des procès collectifs injustes et la garantie de procès équitables, avec l’accès à un service d’interprétariat adapté et une représentation juridique effective.

  • Le respect par la Grèce de ses obligations au titre de la Convention de 1951 et de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne.

  • Une enquête indépendante, en collaboration avec le HCR, sur les conditions de détention des réfugié·es soudanais·es.

Les événements de solidarité organisés en parallèle de la mobilisation :

  • 16 décembre : grande manifestation sur l’île de Crète, organisée par le groupe « Steki » et la société civile.

  • 17 décembre : veillée de protestation devant le tribunal de La Canée (Chania), en Crète, pendant les audiences.

Ceci est un appel à la communauté internationale, aux organisations de défense des droits humains, à toutes les consciences vivantes en Europe et en Grèce : n’ignorez pas notre souffrance. Tenez-vous du côté du droit et de la justice. Soutenez nos revendications légitimes. Nous avons fui l’enfer de la guerre pour tomber dans la prison de l’injustice. Nous avons déjà trop souffert.

Signé : Les réfugié·es soudanais·es en grève dans les camps en Grèce.

Dates : 16–17 décembre 2025

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Voir sur ce lien le communiqué original en grec et en anglais.

Pour suivre la suite de ces mobilisations en Grèce, suivre :

  • Instagram : @mataris_ssc

  • Facebook : Solidarity With Migrants

Equipe

Article réalisé collectivement par les membres de Sudfa Media.

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